Chant

Il fut un temps où le son du tambour s’était tu dans la réserve de St. Mary’s, où vivaient des membres de la Première Nation des Malécites, au Nouveau-Brunswick. Ce silence s’est étendu sur deux générations. À la fin des années 1980, le son du tambour, véritable battement de cœur de la Nation, s’est mis à retentir à nouveau. « Nous n’allons plus jamais perdre ce son », a déclaré Maggie Paul, « gardienne des tambours » de la communauté et membre fondatrice des Wabanoag Singers.

Ce qui suit est un extrait d’une conversation entre Maggie Paul et Franziska von Rosen.

Franziska – Maggie, vous parlez avec tant de passion du « besoin de chants ». Qu’est-ce qui fait qu’il est si important, pour vous, d’avoir des chants?

Maggie – Voyez-vous… Quand je chante, je me retrouve dans un lieu spirituel. Le son à lui seul m’amène jusque là. Voyez-vous… Il n’y a pas si longtemps, à la maison, j’étais allongée sur le lit, et tout à coup, cette fleur est apparue… C’était la plus belle fleur que j’aie vue de toute ma vie. Elle ressemblait à une étoile et elle semblait faite d’un velours mélangeant le bourgogne et l’écarlate. Au centre de cette fleur, il y avait un rayon de lumière d’un jaune intense. Lorsque j’ai examiné de près cette fleur, une voix chatoyante en est sortie. Cette voix… c’était un son magnifique. Je sais que je peux produire le même son… Ce son cristallin clair et cristallin.

Franziska – Pouvez-vous décrire ce son?

Maggie — Il y avait cette… électricité, ou comment dirais-je? Comme le tonnerre ou les éclairs… Oui, ces éclairs qui surgissent quand tout arrive… C’est comme ça quand on chante. Vous pouvez voir cette énergie… (Mme Paul a du mal à décrire le son et utilise ses mains pour s’y essayer.) C’est ainsi que je ressens la musique.

Franziska — Quand on tombe pile sur le bon son.

Maggie – Oui! (L’énergie s’est accumulée dans la pièce. Mme Paul et moi la relâchons en éclatant de rire en même temps.)

Franziska — Ce que vous me dites, Maggie, me rappelle quelque chose que j’ai entendu de la bouche d’un vieil Ojibwé, qui parlait d’un « son original » dans l’univers. Il le décrivait comme un « son chatoyant » qui jaillissait dans tous les sens. Il associait ce son au hochet-gourde et il y percevait la « pensée du Créateur ».

Maggie — C’est bien cela!

Franziska — Il semble que, maintenant, nous parlons vraiment de ce qui est au cœur même de la musique, et non pas de pièces de musique en particulier.

Maggie – Oui! Nous parlons ici de ce qui est au cœur de la musique. Vous savez que lorsque vous ressentez cette musique… Plus vous en parlez, plus vous approfondissez le sujet, et vous ressentez… cette énergie, cette force. (Silence)

La production de cette « énergie » ou de cette « force » avec la voix prend différentes formes en fonction de la région et du répertoire de cette région. Un chanteur de pow-wow ojibwé développe une voix de fausset qu’il produit au fond de la gorge, en poussant le son depuis le diaphragme. Dans la même communauté, un chanteur ojibwé qui a pris part aux cérémonies de la Société de la grande médecine (Midewiwin) viserait plutôt la production d’une voix de tête. (http://www.vocalist.org.uk/voice_registers.html#) Les chanteurs Haudenosaunees produisent eux aussi davantage de voix de tête que les chanteurs des côtes est et ouest du Canada. Ceux qui participent à des pow-wow tentent souvent de reproduire davantage les qualités sonores privilégiées dans les chants du type nordique, en chantant avec des voix de fausset très aiguës.

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